Jour 3 : Lac d’Anterne – col du Brévant

A nouveau ce matin la lumière du soleil filtrée par la tente me réveille à 5h30. Je me lève assez rapidement aidé par la tente qui rend impossible toute station assise. Obligé de sortir directement pour pouvoir m’habiller… C’est frais et ce n’est pas vraiment le moment que je préfère dans la journée mais bon !

Le soleil se lève doucement pendant que je me prépare. La tente est pliée, le sac bouclé et le petit déjeuner avalé. Le spectacle n’étant pas aussi majestueux qu’hier, je ne m’attarde pas et pars dès 6h30.

Levé de soleil sur les Fiz

Nous sommes le 3ème jour, les muscles sont endoloris et il me faut quelques kilomètres avant de remettre la machine en marche. Je commence par descendre sur le refuge Alfred Wills que je surplombe d’un peu plus de 200 mètres. Le refuge est constitué de quelques bâtiments avec des chèvres non loin de là en train de paître dans le creux de la vallée encore dans l’ombre de la montagne. Il fait frais à cette heure encore matinale et je vois quelques personnes, guère plus grandes que des fourmis qui commencent à s’activer autour du refuge.

Je ne saurais dire pourquoi mais j’aime ce moment. Le paysage est beau, le soleil se lève sur la grande muraille des Fiz et ce petit endroit isolé où la vie s’éveille avec le jour me plaît…

Refuge Alfred Wills sortant du sommeil

Je descends tranquillement jusqu’au refuge et le traverse de part en part. Tous ses habitants semblent levés et ne devraient pas tarder à prendre eux aussi la route. Moi je continue sans m’y arrêter et je crois que c’est l’une des rares fois où je me dis que j’aurais bien passé une nuit ici. Ce micro hameau est plein de charme et ne se laisse apprécier que par ceux prêts à marcher plusieurs heures pour venir le découvrir.

Je poursuis ma promenade du jour en longeant puis contournant la montagne des Fiz. Elle est imposante, grise et très haute. En bien des manières elle me rappelle le « rempart » de Mafate.

J’entame une très longue descente pas forcément agréable tant par le chemin que par les paysages mais j’arrive sur la cascade de la pleureuse. Il est 9h, c’est l’heure de prendre le café du matin. Je sors mon réchaud pour ma petite pause devant la cascade.

Je reprends ma route et très vite j’arrive dans une vallée luxuriante où plein de cascades se succèdent sur différents étages. La flore est très présente et embellit ce magnifique tableau. Je remonte cette vallée vers les hauteurs du plateau entourée de parts et d’autres par de grandes montagnes.

Je n’avais initialement pas prévu de passer par ici, pensant que le temps me manquerait mais quelle joie d’avoir pu venir. C’est presque l’une de mes plus belles journées depuis mon départ. Le temps magnifique y est certainement pour quelque chose.

Après avoir croisée beaucoup d’enfants sur cette randonnée (il y a probablement un centre de vacances non loin d’ici), je poursuis ma remontée jusqu’au passage du dévidoir. Une longue traversée de la plaine avant l’ascension jusqu’au dévidoir. Entre névés, pierrier et pente très forte j’arrive en haut bien fatigué.

Mais quelle récompense. Alors que j’ai les yeux rivés au sol depuis une heure pour terminer cette montée, j’arrive enfin sur la crête pour admirer le paysage saisissant sur la vallée de Chamonix et du Mont Blanc. Un spectacle incroyable que je partage avec les rapaces qui se laissent porter par les courants juste à ma hauteur, à seulement quelques mètres de moi.

Evidemment, c’est ici que je décide de poser mon sac pour faire ma pause déjeuner.

Et toi elle est comment ta cuisine où tu manges ?

Je reprends la route après cette pause. Dès le départ, le ton est donné : La pente abrupte dans un pierrier très instable où le chemin est balisé par quelques cordes accrochées dans les rochers. On est plus sur une via ferata que sur un chemin de randonnée. Certains passages sont même plus du ressort de l’escalade ce qui ne me rend pas très à l’aise avec mon sac de 15 kg sur le dos prêt à me déséquilibrer au moindre faux mouvement.

Descente abrupte… c’est pas ce que j’ai préféré

Bref, j’arrive par redescendre entier en bas. Je comprends maintenant pourquoi le chemin sur la carte n’était pas très clairement établi. Je voyais bien qu’il y avait un passage mais cela ne ressemblait pas à un chemin de randonnée classique… et pour cause.

Je remonte ensuite jusqu’au refuge Moët Anterne pour boucler la boucle. Me voilà revenu presque 24 heures plus tard au même endroit mais avec une belle balade entre les deux.

Encore une fois, il est trop tôt pour m’arrêter. A presque 15h je ne veux pas rester ici d’autant plus que le temps n’est pas au beau fixe. J’ai terminé la remontée vers le refuge sous les gouttes, donc rester ici me ferait un après-midi un peu long sans pouvoir faire grand-chose.

Je poursuis donc vers le col de Brévant. C’est encore très loin, probablement 3 ou 4 heures. L’idée, c’est de dormir au pied du sommet du Brévant pour en terminer l’ascension demain matin et profiter du lever du soleil là-haut. Pas sûr que je puisse arriver si loin mais il sera toujours temps de m’arrêter en chemin si je suis trop fatigué.

La pluie fine que j’ai eue sur le chemin avant d’arriver au refuge s’est calmée… un temps avant de se transformer en vraie pluie qui mouille. Obligé de marcher 1h30 avec la gore tex et la capuche, ce n’est pas le plus agréable mais finalement dès lors que je me suis protégé ça n’a pas été si terrible que cela. Et puis lorsque le soleil est revenu j’ai séché assez rapidement.

J’ai failli m’arrêter sur le chemin à cause de la fatigue mais finalement je voulais vraiment me laisser la possibilité de faire l’ascension demain matin au lever du jour. Alors j’ai continué jusqu’au col. La fin de la route se termine par une longue ascension (rien d’étonnant pour accéder à un col…) ainsi que des névés très importants. Beaucoup de neige de ce côté du col où je fais les derniers mètres avec de la neige jusqu’aux mollets.

Peut-on encore parler de névé? ?

En venant jusqu’au col, je tente un peu le tout pour le tout car c’est rarement les meilleurs endroits pour bivouaquer. C’est souvent dans le vent avec peu de place « plate ». Alors, lorsque j’arrive j’espère vraiment avoir fait le bon choix. Au premier abord, ce n’est pas gagné mais en cherchant un peu j’arrive à trouver une petite place en surplomb du col. C’est un soulagement car je suis encore au bout de mes forces aujourd’hui.

C’est particulier de marcher seul. Certains côtés sont indéniablement agréables. Je peux choisir mon chemin, mon allure, je m’arrête quand j’ai envie, je peux changer si j’ai envie, bref, je suis libre mais dès lors que la journée se termine et qu’on n’est plus occupé à marcher alors la solitude prend sa place. Et comme la météo n’est pas spécialement belle permettant de rester dehors à se reposer ou à lire, je marche… je marche jusqu’à l’épuisement total. Jusqu’au moment où je n’ai plus qu’à planter la tente, faire un brin de toilette, manger rapidement et pouvoir aller me coucher pour me reposer.

Ma chambre à coucher…

C’est donc ce que je fais ce soir et les températures très froides m’incitent à aller encore plus vite que d’habitude. Je pars me coucher après avoir profité de cette vue encore incroyable face au Mont Blanc et du glacier des Bossons que je ferai dans 2 jours.

Il est 20h, le soleil a disparu… et moi je ne suis plus.

  • Xelle

    hum … belle réflexion, belles images quelques frissons et pas que pour la température