La Réunion – Carte d’identité

Destination : La Réunion (Mafate et Piton des neiges)
Tour Operator : Voyage organisé par Sébastien
Dates : du 4 au 12 novembre 2017
Auteur du récit : Sébastien

Résumé :
Difficile de résumer en quelques lignes ce trek dans Mafate qui nous mena jusqu’au sommet de l’océan Indien. C’est une aventure à vivre plutôt qu’à résumer. J’ai essayé, autant que possible, de retranscrire dans ce journal ce que nous avons vécu mais l’intensité était telle que les mots ne suffisent pas toujours.

C’était vraiment formidable de retourner une nouvelle fois à La Réunion, même si ça c’est révélé plus éprouvant que prévu… tant de marches à monter et descendre et si peu de plat pour se reposer.

5 jours en autonomie complète en portant dans nos sacs vêtements, nourriture, tente et duvets. Entre 12 et 15 kg sur le dos pour 5500 mètres de dénivelé positif… On n’est pas des aventuriers de l’extrême, mais c’est pas si mal.

S’il ne faut retenir qu’une seule chose de ce voyage c’est : Allez sur cette île de l’Océan Indien. Elle est facilement accessible et tellement riche que nul ne peut en revenir déçu.


Jour 1 : Départ pour La Réunion

Eté 2011. Alors que nous sommes sur le point de quitter La Réunion pour revenir en France après 3 semaines de vacances magiques, nous savons déjà qu’un retour sur cette île est inéluctable. Il y a deux raisons à cela : d’abord parce que Pierre n’a que 18 mois et ne peut donc pas marcher. Il passe ses journées sur mon dos et… c’est pas léger. Cette « contrainte » qui ne nous a pas empêchés de faire de nombreuses balades nous a tout de même dissuadés de descendre dans le cirque de Mafate ou de monter au piton des neiges.

La deuxième raison est plus pragmatique… on a adoré cette île ! Cela reste, encore aujourd’hui, l’un de nos plus beaux voyages. On y trouve une diversité de paysages incroyables sur un tout petit bout de terre. On y mange bien, on y boit également bien, on peut passer de la randonnée en montagne à la sieste sur la plage de sable fin avec cocotiers en moins de 2 heures… bref, après ce coup de cœur on savait qu’on reviendrait ici faire ce que nous avions manqué la première fois.

Néanmoins, ce voyage s’est préparé un peu à la dernière minute. Début octobre on prévoyait de partir au Maroc pour faire l’ascension du mont M’Goun afin de se préparer au Mont Blanc que je veux faire pour fêter mon passage des 40 ans… L’avantage du mont M’Goun c’est qu’il culmine à un peu plus de 4000 mètres et qu’il est assez facilement accessible (même en novembre). C’est donc un premier sommet intéressant pour voir si on supporte l’altitude.

Malheureusement , au moment de réserver le voyage, les dates qui nous intéressaient, ne sont plus disponibles… l’agence nous informe que finalement cette saison n’est pas la meilleure pour faire l’ascension… Étrange mais du coup retour à la case départ : trouver un trek (idée principale) et faire un peu de montagne pour voir comment on réagit physiquement aux dénivelés et à de longues marches. Et puis on trouve, un peu par hasard, des billets pas chers pour La Réunion par une nouvelle compagnie low cost… 12 heures en low cost, c’est peut-être un peu osé mais les prix sont tellement intéressants qu’on tente le coup.

Nous voilà donc le samedi 4 novembre à 18h en train de partir pour l’aéroport d’Orly Sud. Les enfants reviennent d’une semaine de vacances chez Mamilène et feront leur rentrée gardés par Mamy qui est venue à la maison.

On commence ces vacances un peu dans le stress… on a beaucoup plus de bouchons que prévu sur la route et on arrive avec plus de 30 minutes de retard sur l’heure prévue. Ça nous laisse quand même 1h30 avant le décollage mais avec tous les contrôles à l’aéroport c’est pas non plus super large. D’autant plus que l’embarquement est annoncé 1 heure avant le décollage, horaire souvent respecté par les compagnies low cost qui sont bien mieux organisées que les grosses compagnies du type Air France.

Deuxième sujet de stress, nos bagages. Bien qu’on sache qu’on ne dépasse pas les 12 kg autorisés pour un bagage en cabine (de toute façon avec l’eau ça fait 15kg à porter tous les jours, c’est largement suffisant pour un trek), Céline a découvert cette semaine que les gros sacs à dos ne sont pas autorisés… mais c’est quoi un gros sac à dos ? Est-ce que nos sacs de 50 litres en font partie ? En regardant plus en détails les mesures, on est vraiment tout juste… voire on pense vraiment qu’on ne passera pas. Et là c’est 300€ de plus sur le prix des billets si on doit passer en soute !

Finalement tout se passe bien et on rentre dans l’A350 tout neuf de French Blue sans aucune remarque sur les bagages. Première impression de cette nouvelle compagnie très positive lorsqu’on s’installe à nos places. L’écartement entre les sièges est très convenable laissant assez de place pour étendre les jambes. Même pour moi ! Autre contentement, l’écran tactile magnifique ressemblant à un tablette avec une petite sélection de films et séries mais qui s’avérera finalement suffisant.

Pour limiter les coûts, et aussi parce que la nourriture d’avion c’est rarement très intéressant, on a pris notre propre pique-nique. C’est bien meilleur et on n’est pas dépendant du service qui a eu lieu un peu tard après le décollage. Le personnel est très bien, bref, une très bonne note pour French Blue qu’on recommande et qu’on reprendra sans aucune hésitation. Avec ce genre de compagnie, je ne vois pas comment le modèle actuel des compagnies classiques va pouvoir subsister encore longtemps.

12 heures d’avion plus tard nous voilà enfin arrivés à l’aéroport Roland Garros de La Réunion. Il fait beau, il fait chaud mais nous avons presque 1h30 d’attente pour prendre notre bus… c’est ça d’être en autonomie et à pied, on dépend des transports.

Programme du jour, retrouver Emilie et Cyrille rencontrés il y a 7 ans et qui sont partis peu de temps après s’installer à La Réunion. Le bus nous dépose à Saint Leu où Cyrille nous attend pour nous remonter un peu sur les hauteurs où ils ont leur maison. À peine entrés, on a l’impression d’être dans une émission de déco : notre regard se tourne immédiatement vers la baie vitrée. Là une piscine enterrée est installée sur une terrasse en bois avec la mer en arrière plan… et rien d’autre. On croirait une photo de magazine avec 3 plans : l’intérieur de la maison, la piscine et la mer. C’est à tomber ! Et la maison n’est pas en reste, toute la déco est parfaite. Bref, la maison de rêve sur une île.

On passe la journée ensemble à profiter de bons plats réunionnais qu’Emilie nous a préparés, de bons vins, de bon rhum, de la piscine et à papoter sur les 7 années écoulées ou sur notre programme pour la semaine. Pas du tout prévu à l’origine, cette entrée en douceur dans nos vacances nous a fait super plaisir.

La soirée ne n’éternise pas trop. Entre la fatigue du voyage, le (petit) décalage horaire et l’abus de rhum pour Céline :o) on va prendre un nuit bien méritée.

 

 


Jour 2 : Dos d’âne – Deux bras – Aurère


Debout à 7h ce matin. On a un peu de marche à faire aujourd’hui. Même si c’est la journée la plus « tranquille », on a pas mal de bus à faire avant. Petit déjeuner rapide et Cyrille nous dépose à l’arrêt de bus des cars jaunes. Un premier bus nous dépose à Le Port puis un deuxième nous emmène jusqu’à dos d’âne, notre point de départ pour entrer dans le cirque de Mafate.

Il y a 4 chemins principaux pour entrer dans Mafate : Le col du Taïbit au sud, mais qu’on utilisera pour en sortir en direction du piton des neiges, le col des bœufs à l’est mais qui n’était pas très accessible en bus, surtout depuis chez Emilie et Cyrille (qui habitent sur la côte ouest de l’île), le fameux Maïdo, considéré comme l’une des portes les plus difficiles pour y entrer sur l’ouest du cirque et enfin dos d’âne au Nord qui a retenu mon choix. Il y a quelques autres possibilités comme par la rivière galet mais c’est en 4×4 donc ça ne compte pas et la canalisation des orangers avec laquelle j’ai hésité mais on a appris en arrivant à dos d’âne qu’elle était fermée.

Le bus nous dépose à 10h20 avec un autre couple de randonneurs. C’est donc parti pour un peu plus de 10km aujourd’hui et 1000 mètres de dénivelé positif. Sur le papier c’est une petite journée. Sur le papier… On attaque par une longue descente vers Deux Bras dans la forêt. Le sentier n’est pas mémorable, il y a beaucoup de marches, voire des descentes de gros rochers nécessitant d’y mettre les mains, particulièrement pour Céline qui n’est pas très grande.

Moins de 20 minutes après notre départ je trouve un bout de bois pour Céline afin de lui confectionner un bâton de marche pour l’aider… ce n’est pas superflu vu le terrain.

Sur le chemin on rencontre un traileur qui revient de sa course matinale. Il nous explique qu’il est parti de dos d’âne comme nous et a fait un aller/retour jusqu’à l’Ilet à Malheur, soit un peu plus loin que ce qu’on va faire aujourd’hui. Il doit être 11h du matin et il a fait plus du double de ce qu’on va faire dans toute la journée…. Décidément on est bien à La Réunion, terre de trail.

Le chemin en lui même n’est pas très joli mais il nous permet de rentrer dans Mafate au sens propre comme au sens figuré. On prend le temps de cette descente pour s’immerger dans notre semaine de trek en autonomie.

Entrée dans Mafate… quel moment !

Et puis d’un coup, après une bonne heure et demie de descente, la forêt s’entr’ouvre pour laisser place au paysage se trouvant derrière… pour laisser place à ce magnifique tableau tant attendu. Nous voilà devant (et dans) le cirque de Mafate avec un vue sur toute la partie Nord. Toute cette montagne verdoyante et magnifique. Ça y est, nous y sommes pour de bon. Nous voilà là où nous nous étions promis de revenir 6 ans plus tôt et c’est un euphémisme que de dire que nous sommes ravis d’être ici.

On termine doucement la descente pour arriver à Deux Bras, le lieu prévu pour le déjeuner. On cherche où se reposer un peu avec de l’ombre et de l’eau puisque la rivière galet passe ici mais on tombe sur des jeunes en train de profiter d’un beau bassin pour se rafraîchir. On poursuit donc encore un peu avant de s’arrêter à l’ombre d’une falaise le long de la rivière. A défaut de prendre un bain complet, on peut y tremper les pieds pour se rafraîchir.

Si si, elle a vraiment apprécié !

C’est également l’occasion de prendre notre premier repas lyophilisé, enfin pour Céline car moi je l’ai expérimenté pendant mon séjour dans les Pyrénées avec Sébastien (pas moi évidemment, un autre) en septembre. Peu convaincu du concept, Céline n’a pas arrêté de me taquiner avec ça les semaines précédant le départ. Mais après un premier repas, elle a bien été forcée de constater que c’est bien loin d’être mauvais !

Après une petite pause d’une heure (ça passe vite quand il faut faire à manger) on repart sous un soleil resplendissant et chauffant… On arrive néanmoins assez rapidement dans la longue montée de la forêt menant à Aurère. 700 mètres de dénivelé positif pour aller jusqu’à notre lieu de couchage. Une belle montée continue et bien sûr pleine de marches. On a déjà bien compris que Mafate c’est des marches, qu’elles soient en montée ou en descente et une absence quasi totale de plat ou de chemin linéaire (comprendre par là sans marche).

Aux deux tiers de la montée alors qu’on commence à accuser le coup, ou tout du moins qu’on a légèrement ralenti de rythme par rapport à notre allure post repas, on se fait doubler par un local. Son sac à dos est rempli de légumes dont le poids ne fait aucun doute lorsqu’on voit à quel point les bretelles et même les coutures sont en hyper extension. Ajoutez y une glacière elle aussi bien remplie qu’il porte voûté sur sa nuque et on peut comprendre que la vitesse (à défaut de facilité tout de même) à laquelle il nous dépasse à de quoi laisser pantois… Malgré tout il prend quelques secondes pour discuter avec nous. Évidemment, c’est pas tous les jours facile d’habiter dans Mafate où seuls les pieds et les hélicos permettent de se déplacer.

A l’approche d’Aurère, on commence à prospecter un peu à droite et à gauche du chemin pour identifier un lieu afin d’y planter la tente. On trouve plusieurs emplacements sans grande conviction (dont les abords de l’héliport mais ça semble un peu risqué) avant de s’installer sur un petit bout de terre sous les pins ayant une magnifique vue sur la montagne alors que le coucher de soleil approche. Il est 17h30 lorsqu’on s’installe pour passer la nuit après une bonne journée de marche.

La recherche d’un emplacement nous a permis de découvrir ce premier îlet de notre périple dans le cirque. C’est loin d’être le plus petit que nous traverserons et il est plutôt mignon. C’est agréable de s’y balader même si on aurait préféré le faire sans la télé hurlante du voisin qui la regarde avec le volume à fond et les fenêtres ouvertes…

Vue depuis la tente

Dès l’installation terminée, on lance le repas pour profiter des derniers rayons du soleil. En tous cas, au moins pour prendre notre soupe avant qu’ils disparaissent, à peine après 19h, dernière les montagnes de Mafate. Le soleil se couche tôt mais c’est pour laisser place à un magnifique ciel étoilé qui évidemment, ici, est exempt de toute pollution lumineuse. Un vrai bonheur pour les contemplateurs de ciel nocturne que nous sommes. L’occasion d’une petite balade post-prandiale en amoureux dans le silence omniprésent de la nature environnante… Des moment comme on en a peu chez nous.

Cette première journée de reprise n’a pas été facile et il a fallu relancer la machine, surtout pour Céline qui partait tout de même avec l’handicap d’une nuit difficile et d’un réveil nauséeux. Néanmoins le plaisir d’être dans ce décor ne peut laisser la place qu’au bien-être et avec la conviction qu’on est exactement là où on doit être et pas ailleurs. C’est incroyable comme ce sentiment m’habite à chacune de mes « expéditions » en pleine nature…

La journée se termine enfin et après avoir testé les repas lyophilisés pour la première fois ce midi, place au test de la tente à deux. Évidemment pour des raisons d’encombrement et de poids, notre tente est toute petite mais finalement bien assez grande pour nous deux, même si on est tricoté serré.

Bilan du jour : 10,1km – 1034m d+ – 1020m d-


Jour 3 : Aurère – Îlet à Malheur – Grand place – Les Orangers


6h30 le réveil sonne. Le soleil est levé depuis 1h00 lorsqu’on sort notre nez de la tente pour regarder ce qu’il se passe dehors. Après un rapide habillage, place au rituel du petit déjeuner. Par manque de place j’ai dû abandonner mon lait au chocolat du matin pour le remplacer par du thé… c’est loin d’être pareil mais au moins j’ai une boisson chaude pour accompagner mes céréales. Ce premier repas de la journée est simple mais finalement rassasiant et plein d’énergie.

 

 

 

 

 

 

Il est 8 heures lorsqu’on est prêt à prendre la route pour une longue journée. On quitte Aurère pour attaquer notre première descente de la journée en direction de l’îlet à Malheur qui se trouve un peu plus loin. Ce premier îlet de la journée est magnifique, fleuri avec de belles maisons et de beaux jardins. Il y règne une atmosphère particulière sans que je sache la décrire précisément. Ça restera mon îlet préféré de ce cirque.

On n’en est encore qu’au tout début de la matinée, alors on ne s’attarde pas et on met le cap directement sur l’îlet à Bourse qui suit de prêt celui où nous sommes. En chemin, on passe par une bambouseraie. Je ne perd pas une seconde pour me fabriquer deux beaux bâtons de marche en bambou. J’ai toujours voulu tester les bâtons sans vraiment le faire. Aujourd’hui ce n’est plus une option. Il est indispensable d’avoir des bâtons si on veut randonner sérieusement dans Mafate. J’en profite également pour remplacer celui de Céline, un peu gros par un bambou flambant neuf.

 

 

 

 

 

 

On traverse l’îlet à Bourse sans que celui-ci me laisse un souvenir particulier. Je ne peux néanmoins pas en dire autant d’un bassin qu’on a rencontré au passage d’une rivière. Un magnifique bassin, pas très grand mais assez profond pour qu’on s’y baigne en entier. D’ailleurs les randonneurs nous précédant ne s’y sont pas trompés puisqu’ils sont en pleine séance de trempette.

On hésite beaucoup à s’arrêter et à prendre leur suite lorsqu’on les voit sortir doucement pour aller se rhabiller. D’un côté il fait chaud et on a vraiment envie d’aller se rafraichir dans cette baignoire naturelle mais d’un autre, on s’est déjà arrêté il y a 30 minutes pour faire la lessive à la rivière précédente et surtout on est parti d’Aurère il n’y a pas encore deux heures…

Finalement on poursuit notre marche d’autant que le chemin de ce matin est très agréable et joli. Principalement dans la forêt on s’arrete régulièrement en regardant sur nos pas pour apercevoir tout le chemin parcouru ce matin. Et comme souvent en montagne, plus le temps passe plus cela semble impressionnant, même si finalement les distances en elles mêmes ne sont pas très importantes.

Après une demie journée de marche, on s’arrête à Grand place pour la pause du midi et je crois qu’on peut définitivement dire qu’on ne trouvera pas de plat dans Mafate et qu’il faut qu’on se fasse aux escaliers… La pause se fait à l’ombre des arbres en entrée de Grand Place, un tout petit îlet situé avant une longue descente rejoignant une nouvelle fois la rivière galet, du moins c’est ce qu’on espérait pour pouvoir se baigner et ne plus regretter de ne pas s’être arrêté dans le bassin ce matin.

Mais avant d’entamer la descente on passe par le centre de Grand Place pour récupérer de l’eau et on tombe nez à nez devant la statue du fameux facteur de Mafate qui a parcouru 150 000 km à pied durant sa carrière en livrant le courrier dans tout le cirque par rotation d’une semaine. Il devait avoir la forme quand même le gars !

Après une petite photo souvenir on attaque la longue descente durant laquelle je trouve un bel opinel… et ça tombe plutôt bien puisque n’ayant pas de bagage en soute, je n’ai pas pu prendre le mien. Ça pourra toujours servir.

La rivière galet commence à se rapprocher et à se faire de plus en plus désirer. Comme toujours, la descente n’est pas des plus reposante pour les genoux. On y va tranquillement lorsqu’enfin on est proche d’elle… mais pas assez ! J’aperçois à travers les arbres une structure métallique… j’avance encore un peu et cette fois j’arrive à identifier ce que c’est : une passerelle qui enjambe la rivière ! Impossible de descendre se rafraîchir alors qu’on en rêve depuis un moment. Petit coup au moral mais on repart sans s’arrêter pour attaquer cette fois-ci la remontée vers les Orangers.

Toute la montée se fait à découvert. Il fait toujours chaud mais les grosses chaleurs de 14h sont maintenant passées. On arrive à monter sans souffrir du soleil. Néanmoins, là où les chemins de ce matin étaient vraiment agréables, cette fois-ci ce n’est pas le cas. Le chemin n’est pas très intéressant et on longe une canalisation d’eau (la canalisation des orangers) qui vient alimenter l’îlet des Lataniers se trouvant sur notre gauche mais vers lequel on ne passe pas. C’est ni plus ni moins qu’un gros tuyau en plastique noir le long du chemin.

La dernière partie de notre marche du jour est elle beaucoup plus poétique. Arrivés à la zone de captage des orangers (de là ou la canalisation tire son eau pour alimenter une partie de l’ouest de l’île) le paysage change. On se retrouve au fond d’une sorte de petit canyon à marcher sur de gros cailloux. Au milieu coule une rivière (sans Brad Pitt) venant alimenter un végétation bien plus importante qu’habituellement. La photo comme la lumière sont superbes !

Cette dernière heure d’ascension nous mène directement aux Orangers, îlet complètement disloqué sur plusieurs petites collines réunies par des escaliers dans tous les sens. On trouve un petit bar/épicerie où on prend notre première dodo (bière locale) ainsi que quelques bouchons plus que mérités.

 

 

 

 

 

 

Satisfaits de notre belle journée de marche, on entend la discussion d’un couple arrivé peu de temps après nous et attablé à côté qui nous déprime un peu… Ils ont fait plus de 20 km, 2000 de d+ et 2900 de d-. Et tout ça avec une mine resplendissante.

Alors c’est vrai que la fille arbore un maillot de finisher du trail de Bourbon (111km et 6500 de d+) mais quand même, c’est un peu vexant !

On installe notre bivouac juste au dessus du bar sur le seul terrain plat de l’îlet qui appartient justement au bar et qu’il loue comme place de camping… Bon, les tarifs sont un peu abusés mais on a un point d’eau, des toilettes et surtout une superbe vue sur les montages nous permettant encore une fois de profiter d’un beau coucher de soleil rosé.

Le soleil couché, le repas pris, on profite encore ce soir d’un ciel dégagé et étoilé qui nous permet de nous évader dans l’infini des galaxies.

Quelques étoiles filantes plus tard et poussés par le froid, on rentre se mettre au chaud dans la tente pour lire une petite demie heure avant de se coucher et se reposer pour une autre bonne journée qui nous attend demain. Il n’est que 21h15 lorsque j’éteins ma liseuse, mais dès lors qu’on vit dehors, on vit avec le soleil.

Bilan du jour : 12,4km – 1156m d+ – 1069m d-


Jour 4 : Îlet des Orangers – Roche plate – 3 Roches – Marla

Hier on n’a pas vraiment eu l’occasion de prendre le temps de se poser quelque part pour profiter du paysage ou dessiner (pour Céline bien sûr). Du coup ce matin on décide de se lever 30 min plus tôt (sans que cela soit vraiment un effort). Debouts à 6h, départ à 7h20. En fait c’est surtout la pause du midi qu’on voudrait allonger un peu.

Le programme d’aujourd’hui n’est pas encore très clair. En préparant le trek je me suis laissé plusieurs options en fonction de notre vélocité et de nos envies. Les points de passage sont les mêmes : Roche plate et 3 Roches mais le lieu de couchage pourra varier : 3 Roches (et ses alentours) ou La nouvelle, « capitale » de Mafate qui se trouve un peu plus loin.

En attendant, on lève le camp pour continuer notre « balade » (étrangement Céline n’aime pas trop quand je dis ça ;o) en direction de Roche Plate. On amorce la descente des Orangers pour suivre le chemin longeant la montagne avec le Maïdo, au dessus, veillant sur nous. On le voit se rapprocher de plus en plus. Le chemin pour arriver au point de jonction entre la descente du Maïdo et le GR redescendant sur Roche Plate est encore une fois splendide ! Encaissé dans la montagne avec une végétation très présente et une lumière du matin douce mais en même temps intense, on se gave du plaisir d’être là.

Ca ne rend pas justice mais c’est la plus belle vue du cirque

 

Bientôt, le chemin plat (enfin je veux dire pour Mafate donc ça reste relatif) laisse place à une nouvelle montée rejoignant la descente du Maïdo. Là une vue à 180° sur le cirque nous attend. C’est pour moi la plus belle vue du cirque de notre trek, avec d’un côté une vision sur le Nord et le chemin parcouru et de l’autre, le sud et ce qui nous attend. Je gardais déjà un souvenir incroyable de cette vue, quelques centaines de mètres au dessus, au Maïdo, lors de notre premier passage sur l’île. C’est exactement cette vue qui nous a fait dire que nous reviendrions un jour pour parcourir l’intérieur de ce monument de la randonnée.

Évidemment, on ne pouvait pas passer sans s’arrêter, alors on en profite pour faire une pause. Bien sûr pour prendre des photos mais aussi, et surtout, pour contempler… contempler ce spectacle vivant (si si) que la nature nous offre et que rien ne peut imiter. On est devant l’un de ces paysages comme le Grand Canyon, les Rockies, le lever de soleil sur le Bromo et tant d’autres qui ne peuvent laisser insensibles. Tant de beauté qui forcément émeut.

Le paysage est magnifique mais il faut bien repartir. On emprunte la descente vers Roche Plate sous les pins avec certainement pour la première fois, ce qui ressemble à un chemin légèrement descendant sans la moindre marche sur une distance d’au moins… 300 mètres ? Bref, on profite de ce terrain facile et agréable pour continuer d’admirer cette vue époustouflante sur le cirque tout en marchant (pouvoir faire les deux est très rare dans Mafate).

La distance jusqu’au prochain îlet n’est pas très longue et Roche Plate se laisse découvrir assez rapidement par l’intermédiaire d’un nouveau gite (on imagine) en construction. Structure tout en aluminum (certainement pour une question de poids pour les hélicoptères) où se dessine déjà très clairement ce qui deviendra un terrasse avec vue montagne à couper le souffle. On s’imagine déjà en train de prendre une petite doudou allongé dans un fauteuil après une longue journée de marche.

Mais la dernière pause n’est pas loin alors on ne fait que passer pour continuer notre route et traverser complètement l’îlet.

Une cargaison d’hélicoptère à sortir du cirque

 

On prend la route de 3 Roches lorsqu’on aperçoit entre les arbres à quelques centaines de mètres de nous un hélico qui vient chercher les poubelles et autres produits à transporter vers d’autres lieux. C’est toujours impressionnant de voir les hélicos faire leur rotation avec ces gros sacs suspendus 10 mètres sous eux.

La route jusqu’à 3 Roches sera longue et à découvert sous un soleil très généreux. De ce côté, on a plutôt de la chance puisqu’on avait un prédiction météorologique juste avant de partir qui n’était franchement pas terrible avec de la pluie presque tous les jours. Mais Emilie et Cyrille nous avaient bien prévenus, il ne faut pas croire la météo et encore moins celle dans le cirque qui est très difficilement prédictible.

Le rempart sur la droite

 

Cette route entre Roche Plate et 3 Roches est vraiment impressionnante car on longe le rempart du Maïdo, cette énorme falaise complètement verticale de pas loin de 1000 mètres de haut je pense. La sensation est vraiment très particulière lorsqu’on la longe sur plusieurs kilomètres. Elle porte indéniablement bien son nom tant on a l’impression d’être au pied d’un château totalement imprenable.

Quelques minutes avant l’arrivée sur la zone de la cascade de 3 Roches, on fait une petite pause chez un vendeur de miel qui a eu la bonne idée d’écrire en face de sa boutique qu’il vendait également une citronnade maison et fraîche… il n’en faut pas plus pour nous convaincre de s’arrêter nous désaltérer chez lui. Une pause qui fait du bien puisqu’on doit être parti des Orangers depuis près de 5 heures maintenant. Et contre toute attente, en plus de la citronnade, on peut également manger des crêpes… il n’en faut pas plus pour Céline qui succombe à l’appel de la Bretagne alors même qu’on va prendre notre déjeuner juste après. Mais comment lui en vouloir de céder devant cette crêpe qui était particulièrement bonne.

Repus, désaltérés et reposés, nous voilà repartis pour terminer les quelques mètres nous séparant de la cascade de 3 Roches. J’en avais entendu parler un peu partout sur les blogs en préparant le voyage sans en voir de photo. Je ne savais pas à quoi elle ressemblait si ce n’est qu’on se trouve au haut de la cascade et qu’on la voit disparaître dans les profondeurs…

Effectivement, on s’approche d’une grande surface plane faite de roche au milieu de laquelle s’écoulent plusieurs flux d’eau convergeant vers cette fameuse cascade. L’inconvénient de voir une cascade d’en haut, c’est qu’on ne peut pas l’embrasser du regard dans sa globalité. On doit choisir quelle partie regarder : le haut avec l’eau se précipitant dans un puit sans fond ou le bas, résultat d’une longue chute de plusieurs dizaines de mètres … encore qu’en l’occurrence, le fond n’est même pas visible tant le bord n’est pas accessible… ou plutôt il l’est trop bien mais du coup c’est trop dangereux de s’en approcher pour se pencher.

Cascade de trois Roches

 

En tout cas, c’est une belle cascade mais qui n’impressionne pas autant qu’une grosse qui chute de toute sa hauteur dans un bruit assourdissant vaporisant des gouttelettes d’eau partout aux alentours comme on a pu en voir au Canada ou même ailleurs sur l’île du côté du cirque de Salazie.

Après ce petit temps d’observation, on pose les affaires pour préparer le déjeuner. C’est également l’occasion de tremper les pieds dans la rivière mais sans s’attarder car il y a des sangsues un peu partout. On profite des parties où le courant est rapide pour se rafraîchir sans craindre les bêtes de sang. Et comme on est parti plus tôt ce matin, on prend le temps d’une petite sieste de 20 minutes allongé sur la pierre chauffée par le soleil profitant ainsi de ses bienfaits reposants, voire réparateurs de la chaleur rayonnante réconfortant nos muscles endoloris.

Initialement j’avais prévu de nous poser pour la nuit dans les alentours. Mais il n’est que 15h45 et on a encore assez d’énergie pour continuer, alors on reprend nos sacs, on remet nos chaussures et c’est reparti. Notre objectif ultime reste le piton des neiges et c’est un gros morceau. Donc on fait tout pour en rendre l’ascension possible (1800 mètres de d+ dans la journée c’est pas non plus super facile, mieux vaut être en forme) donc à ce titre on préfère continuer pour réduire notre journée de demain et être en forme pour l’ascension.

On se dit que si on trouve un endroit sympa sur la route on s’arrêtera, sinon on ira jusqu’à Marla qui est à 2 heures de marche.

Notre chemin longe la rivière galet retrouvée à 3 Roches pendant un moment tout en étant à découvert. Il est 16h passées, donc la chaleur ne nous accable plus. Les nuages commencent même à progresser sur les hauteurs du cirque. Ajoutez à cela la couleur sombre de la pierre et l’absence de végétation et on se trouve dans une atmosphère un peu triste, voire pesante.

Après une petite heure de marche, on trouve un endroit très sympa pour poser la tente. Exactement ce qu’on recherchait : près de la rivière pour pouvoir se laver, faire la lessive ou encore faire nos réserves d’eau potable, complètement excentré d’un îlet pour être vraiment au calme et seuls, un terrain à peu près plat qui a l’air confortable, bref, toutes les conditions sont réunies sauf qu’on est encore à 1h de Marla. Et ce qu’on ne fera pas aujourd’hui, on le fera demain et c’est ça de plus qu’on n’aura pas pour se reposer.

Après un long moment d’hésitation nous caractérisant tant Céline et moi, nous voilà repartis pour Marla et une dernière heure de marche majoritairement en montée. Après 300m de d+, Marla se dessine. On trouve un petit coin pour planter la tente juste en lisière de l’îlet, avant même d’y pénétrer. On s’installe pour la nuit tout en faisant attention à l’utilisation qu’on a de notre eau car il n’y en a pas ici ce soir.

Pour une fois on prend même le temps de faire un petit feu avec les quelques branchettes mortes qu’on trouve aux alentours. L’endroit du bivouac est vraiment sympa avec une belle vue sur la montée vers le col du Taïbit qu’on prendra demain pour sortir du cirque. Nous voilà déjà au terme de ce trek dans Mafate. Notre moral est à l’image du paysage, magnifique mais couvert par les nuages descendants venant obstruer un peu notre joie d’être ici et d’avoir passé 3 jours absolument géniaux.

La sortie de Mafate se dessine…

 

La journée se termine dans les nuages (au sens propre comme au figuré) et par un coucher assez tôt comme d’habitude. Il fait dire qu’on a des bonnes journées de marche puisqu’on doit être autour des 8h de marche effectives pour 10 heures sur la route, ou plutôt dans les escaliers devrais-je dire. L’utilisation des bâtons a été une vraie révélation pour moi. C’est incroyable la puissance qu’on peut gagner avec l’utilisation de ses bras dans la marche. Ils facilitent très clairement la randonnée dans ce cirque. Après, je pense que je ne les réutiliserai que sur un terrain à très fort dénivelé ou peut-être dans les futurs trails en montagne.

Et la surprise du jour, c’est un nouveau cadeau trouvé sur la route, comme si celle-ci voulait me récompenser d’être venu à sa rencontre. Après l’opinel hier, place aujourd’hui à un buff… ça sert toujours un buff ! En l’occurrence je l’ai mis sur l’un de mes bâtons de bambou pour me protéger les mains qui commencent à cloquer… bonne nuit dans la brume.

Bilan du jour : 11,7km – 1173m d+ – 583m d-