Jour 2 : Lac Blanc – Lac d’Anterne

5h30… mon réveil biologique s’allume. L’intensité de la lumière à l’intérieur de la tente se fait plus importante. Je sors la tête pour voir ce qu’il en est : il est temps de sortir si je veux voir le lever du soleil.

Rapide tour d’horizon. La tente en contrebas de ma position est partie dans la nuit. Je la retrouve tout en bas… ils ont dû avoir le même problème que moi cette nuit.

Bien que je vois enfin le Mont Blanc, le lever de soleil n’est pas aussi beau que j’aurai pu l’espérer. Je passe donc vite à l’étape suivante : je sors toutes mes affaires pour tenter de les faire sécher. Je vide mon sac qui est gorgé d’eau et tout est étalé dehors. Entre le froid et l’ombre, je ne m’attends pas vraiment à ce que cela sèche.

Je prends mes affaires pour petit déjeuner et je grimpe un peu pour sortir de l’encaissement où je me trouve. La vue est vraiment belle. Entre le lac blanc et toute la chaîne du Mont Blanc, j’ai enfin la vue que j’étais venu chercher.

Progressivement la lumière s’intensifie, puis les couleurs du matin apparaissent également. Toute la palette du rose au violet est là. Enfin le soleil fait son apparition, lentement et discrètement il vient illuminer le point culminant à presque 5000 mètres juste en face de moi. C’est un beau spectacle, pas le plus beau des levers de soleil mais ça valait vraiment le coup de se lever tôt.

Après une séance photo, je reprends la route avec un sac trempé qui dégouline dans mon dos. Ça passera… Il est 7h lorsque je quitte mon bivouac à destination du mont Buet. C’est l’objectif du jour.

L’un des lacs de Cheserys

J’arrive rapidement aux lacs de Cheserys un peu plus bas. Il y a beaucoup de monde en train de se préparer après un lever récent. Il y a même étrangement plus de monde qu’au lac Blanc (normalement c’est le contraire).

La redescente jusqu’au col des Montets (départ habituel du tour des aiguilles rouges) est très agréable. Je garde la chaîne du Mont Blanc pendant un long moment avant de plonger de 1000 mètres en contrebas. Je suis un sentier au travers d’une végétation très luxuriante vu l’endroit où l’on se trouve. C’est vert, il y a des fleurs et je croise souvent de l’eau. Ce n’est pas ce qui manquera sur mon périple.

Aujourd’hui encore je croise des bouquetins… décidément ils sont relativement présents pour l’instant tout comme le car d’asiatiques qui monte à contre sens de moi. Au moins une trentaine de personnes les unes derrières les autres. Ça fait bizarre de croiser autant de monde ici.

J’arrive donc au col des Montets après 2 heures de descente. Le soleil m’a à nouveau quitté depuis un moment. Le ciel est couvert mais la température n’est pas fraîche.

Petite pause-café avant de repartir en direction du refuge de la Pierre à Bérard. La moitié des 2h30 de montée se passe dans la forêt de sapins. Un torrent est également là pour m’accompagner jusqu’au refuge. La lumière filtrée par les branches donne une ambiance particulièrement agréable en laissant passer les quelques rayons de soleil. Comme d’habitude, passé les 1800 mètres d’altitude les conifères laissent place à une végétation plus florale.

Je profite du refuge pour m’offrir une pause coca… que finalement je n’apprécie pas particulièrement. Il est 11h passées et je commence à fatiguer un peu. Encore 3h30 jusqu’au sommet du mont Buet, point culminant de ma semaine.

J’y retourne donc motivé par le panorama que j’attends de découvrir là-haut.

Je passe les 2000 mètres rapidement et les névés sont très présents de ce côté. J’en traverse plusieurs et je perds un peu le fil du chemin. Je me retrouve dans une montée très abrupte m’obligeant à mettre les mains pour continuer d’avancer.

Trop fatigué, je décide de m’arrêter faire ma pause déjeuner. Je fais même une petite sieste pendant que le repas chauffe… la journée est vraiment épuisante et je suis encore loin du but (bien plus que je ne le croyais à ce moment-là).

A peine revigoré après cette pause je continue la montée à travers névés et gigantesque pierrier. Je croise deux autres randonneurs que je suis, vu la technicité du terrain. C’est bien de ne pas être seul ici.

L’ascension se fait lentement et prudemment d’autant plus qu’il n’y a plus vraiment de chemin là où je me trouve. Le mont Buet est devant moi mais caché par une épaisse couche de nuages. Mais j’y crois encore, il y a du vent et les nuages vont et viennent.

Beaucoup trop de neige pour faire l’ascension du Buet

Malheureusement, je dois me résoudre à bifurquer vers le col de Salenton. La neige est bien trop présente pour envisager une ascension du mont Buet dans des conditions de sécurité optimale. Il y a de la déception c’est évident, j’en avais fait mon « objectif » de la semaine, c’était le seul 3000 accessible dans le coin. Pas de chance, cette année il y a beaucoup trop de neige (et en même temps c’est aussi ce qui rend le paysage si beau).

Je poursuis donc jusqu’au col de Salenton qui me permet d’avoir une vue d’un côté sur le Nord-Est et toute la vallée que je viens de traverser et de l’autre sur la journée que j’avais prévue pour demain. J’hésite à planter la tente au col mais il y a pas mal de vent et il n’est que 15h… et je fais quoi après ?

Regard en arrière sur ce que j’ai fait ce matin

La fatigue est évidemment très présente après ce début de journée mais je me dis que je peux «gagner » une journée en continuant de marcher jusqu’à ce qui devait être mon bivouac de demain. Ça devait être une petite journée de repos donc c’est peut-être jouable. En tout cas je préfère cela plutôt que de rester là.

Je bascule donc de l’autre côté du col en direction du refuge de Moëte Anterne. Je descends dans un pierrier avant de retrouver un petit chemin dans l’herbe. Les moutons ne sont pas loin ; la verdure et les fleurs de la vallée sont de retour. Je suis au fond de la vallée, entouré de part et d’autre par ces immenses montagnes qui me rappellent que je suis tout petit et uniquement de passage dans cette environnement magnifique.

Qui suis-je au milieu de ce massif des aiguilles rouges ?

Je poursuis ma route jusqu’au refuge. Marcher devient difficile, la fatigue est vraiment très présente. Je pensais bivouaquer ici étant donné ma fatigue mais le lieu n’est pas propice. Ou plutôt le lieu ne me convient pas. Trop de bâtiments, le refuge n’est assez grand et constitué de plusieurs bâtiments. Si je suis parti en autonomie c’est pour me retrouver seul au milieu de la nature.

Alors je continue. Je fais une pause de 15 minutes pour reposer mes jambes et m’alimenter un peu mais je repars. Je repars à destination du lac d’Anterne, destination initiale de demain soir. Il me reste une heure de marche pour y arriver, mais surtout une dernière ascension de quelques centaines de mètres.

Je m’attendais à une ascension lente et difficile mais finalement l’énergie me revient. Je monte à marche forcée avec mes bâtons pour m’aider. En haut les nuages sont devenus gris et les gouttes arrivent doucement. J’ai une vue sur les Fiz. Je me demandais en préparant cette rando à quoi pouvait ressembler cette énorme barre rocheuse. Maintenant je sais et c’est assez impressionnant.

Je bascule donc de l’autre côté sans m’arrêter au col pour mettre un point final à cette journée. Rarement j’aurai été aussi fatigué après une journée de marche.

J’arrive au lac à 18h15. Cette fois-ci je suis totalement seul. Le paysage est superbe. Le torrent se sépare en une multitude de petits bras d’eau se jetant dans le lac. Avec la lumière et la brume, l’ambiance est quelque peu étrange.

Cette fois-ci je prends mon temps pour trouver où mettre ma tente. J’étudie toutes les options en fonction de la pente du terrain autour de moi, je fais attention de ne pas me mettre dans une petite cuvette naturelle, bref je fais en sorte que même s’il pleut comme hier je sois au sec cette fois ci.

Je profite d’avoir encore un beau torrent à côté de moi (d’ailleurs je vais sûrement bien l’entendre cette nuit) pour faire une grosse toilette. Le fond de l’air est frais mais c’est rien comparé à la température de l’eau. Impossible de mettre les pieds dans l’eau plus de quelques dizaines de secondes. Après la douleur du froid est trop insupportable.

Néanmoins, une bonne toilette complète est certes sur le coup difficile mais devient rapidement source de bien-être et de relaxation. Je n’irais pas jusqu’à dire que cela enlève toute trace de fatigue mais c’est vraiment délassant.

Abri de fortune pour repas au sec (ou presque)

La fin de soirée, ou on pourrait presque dire d’après-midi vu l’heure qu’il est, est pluvieuse. Le vent s’est levé et souffle fort apportant quelques gouttes. Par chance, à défaut d’avoir une tente assez grande pour pouvoir y manger, j’ai trouvé un abri de fortune sous un rocher. Ce n’est pas super confortable mais ça me permet de manger à peu près au sec.

Le repas terminé, je profite d’une petite accalmie pour aller me coucher et dormir d’un sommeil très léger malgré une fatigue très présente.

  • Xelle

    ouaou …. quelle résistance ! Bon évidement je me demande comment tu arrives à trouver ton chemin là dedans … mais ça tu me connais … j’imagine aussi les incertitudes quand le terrain devient difficile, le temps incertain et que tu es tout seul au moooooooonde 😉 en tout cas bravo

    • Je m’oriente avec le soleil majoritairement et de temps en temps avec mon GPS 🙂